ALTER INFO
Tout ce que vous avez voulu savoir sur la mammographie sans que votre médecin ose se renseigner…
Comme chaque année à la
même époque – et sans considération pour l’épuisement financier
progressif de notre assurance maladie – c’est reparti pour la promotion
de la mammographie. A entendre les autorités sanitaires – relayées par
la presse et, apparemment, par la majorité du corps médical -, la
survie de la plupart des « femmes que nous aimons » [1] dépendrait de
ce dépistage, qu’il conviendrait d’intensifier encore.
Et, selon une dynamique d’entraînement propre à toutes les
grandes causes religieuses, on trouve – par exemple sur Le Post – la
revendication des nouveaux convertis qui en réclament toujours plus,
cette fois en direction des femmes plus jeunes, présentées en l’espèce
comme victimes d’un scandaleux oubli. Un peu comme en 1994-95, quand la
fédération des parents FCPE tonnait de tout son prestige laïque pour
dénoncer la pingrerie de Douste-Blazy qui avait lamentablement limité
aux classes de sixième les bénéfices évidents de la vaccination contre
l’hépatite B : ambiance [2]… A quand la mammographie chez les
adolescentes ?
Critères intrinsèques de crédibilité
Conformément à la méthodologie que les visiteurs du présent site
commencent à connaître, essayons d’identifier quelques critères
intrinsèques qui, même dans un débat hypertechnique, donnent au citoyen
de base des éléments de fait, facilement vérifiables par tout un chacun
et lui permettant de se réapproprier quelques éléments d’appréciation.
• Selon Roselyne Bachelot interviewée par Elle (08/10/10), « le
cancer du sein est l’un de mes combats de santé publique. Un dépistage
précoce améliore le pronostic, facilite la prise en charge et accroît
les chances de guérison. » Compte tenu de la crédibilité de la Dame
relativement à l’évaluation et, plus généralement, du gouvernement
auquel elle appartient relativement aux conflits d’intérêts, on peut
déjà s’interroger [3].
• Sur environ 70 articles consacrés au sujet et obtenus en
pianotant rapidement sur Google Actualitésen date du 10/10/2010, j’en
trouve un seul évoquant les inconvénients potentiel d’un tel dépistage.
Or, il est exceptionnel que sur une question sociétale d’intérêt, les
opinions dissidentes ne comptent que pour moins de 2% des voix. Même
sur des mystifications aussi grossières que la grippe H1N1, le
pourcentage de citoyens tombés dans le piège de la promotion vaccinale
tournait autour de 10% : c’est vous dire…
• Même si (on se demande bien pourquoi), l’essentiel de la
littérature pertinente sur le sujet est en langue anglaise, il suffit à
n’importe qui de taper – en français – sur n’importe quel moteur de
recherche « mammographie et surdiagnostic » ou « cancer du sein et
surdiagnostic » pour apercevoir que les choses sont loin d’aller de
soi. Pourquoi la promotion officielle de la mammographie ne
donne-t-elle aucun écho à des incertitudes aussi patentes ?
• Depuis plus d’un an, les visiteurs du présent site ont été
initiés au travail de la fondation Cochrane qui vise à faire
l’inventaire des données disponibles sur des traitements ou des
stratégies médicales. Il s’avère que sur la question des mammographies,
les données disponibles sont tellement peu compatibles avec la
promotion des autorités sanitaires que, en une initiative sans
équivalent à ma connaissance, les auteurs de la revue correspondante
ont tenu à diffuser en plusieurs langues un récapitulatif à l’usage des
profanes – dont on trouvera en pièce jointe la version française. Il
n’y a pas besoin d’avoir fait la fac de médecine pour voir que les
preuves disponibles sont peu compatibles avec le message promotionnel
sans nuance de notre ministre de la santé… On y verra notamment les
auteurs se poser exactement la question de l’alinéa précédent, à savoir
: comment se fait-il qu’il soit si difficile aux femmes visées par les
actuelles campagnes d’être à tout le moins informées quand aux
réserves pourtant nombreuses qu’on peut entretenir à l’égard de ce
dépistage et de ses bénéfices présumés ?
• Même s’il faut lire un peu l’anglais pour aller vérifier la
source [4], un récent article du Los Angeles Times (04/10/10) permet de
repérer Astra Zeneca, l’un des principaux fabricants d’anticancéreux
(et actuellement 6e firme pharmaceutique mondiale en chiffre
d’affaires), derrière les campagnes de dépistage : mélange des genres
intéressant, en vérité…
Un peu d’arithmétique
Destinés à faciliter la
représentation du lecteur, les chiffres donnés ci-après sont
théoriques, mais permettent de poser clairement le problème de base (il
y a d’autres questions plus subtiles, mais il importe d’en
hiérarchiser l’importance). Imaginons que, historiquement (avant toute
procédure de mammographie), la moyenne d’âge pour le diagnostic d’un
cancer du sein soit de 60 ans et que, toujours en moyenne, la durée de
survie après ce diagnostic soit de 8 ans (soit, donc, un décès à l’âge
moyen de 68 ans). A présent, imaginons que, grâce au dépistage, le
diagnostic soit avancé de trois ans, et qu’il soit fait en moyenne à
l’âge de 57 ans.
• Même si ce dépistage ne
se traduit par aucun bénéfice en termes de survie (âge de décès
toujours à 68 ans), on a mécaniquement augmenté la durée de survie des
malades, puisqu’on est passé de 8 ans (68 ans – 60 ans) à 11 ans (68
ans – 57 ans). Un coup dans l’eau ? Pas tout à fait : de 57 à 60 ans,
on aura quand même perdu 3 ans de vie normale et il suffit de renvoyer
chacun(e) à son expérience de la chose pour comparer trois ans de
chirurgie/radiothérapie/chimiothérapie à trois ans de douce
inconscience – pour un bénéfice strictement nul en termes d’espérance de
vie.
• Encore plus fort :
imaginons que, par suite notamment des effets indésirables d’une prise
en charge médicale « énergique », l’espérance de vie des femmes ainsi
dépistées soit raccourcie, et que celles-ci décèdent, par exemple, à
l’âge moyen de 66 ans. Les zélateurs du dépistage – ceux là même qui
confondent 94 millions de doses vaccinales utiles avec moins de 10
millions utilisées [5] – pourront toujours arguer que l’espérance de
vie après diagnostic est passée de 8 à 9 ans (66 ans – 57 ans) : la
réalité sera que par rapport à l’époque « historique » pré-mammographie
où les femmes atteintes mourraient en moyenne à 68 ans, elles auront à
présent une perte objective d’espérance de vie de deux ans… Tout cela,
une fois encore, au prix des souffrances connues d’un traitement
anticancéreux…
On aura déjà fait un grand
pas quand ces chères femmes que nous aimons tous tellement au point de
nous faire un devoir de les exhorter au dépistage systématique auront
compris cette réalité arithmétique simple…
Questions complémentaires
En
médecine, on l’oublie trop souvent, le 100% n’existe pas : de même
qu’il n’existe pas de médicament efficace à 100%, il n’existe pas non
plus d’examen de dépistage fiable à 100%.
• Avec la mammographie,
il va donc y avoir des faux négatifs, à savoir des femmes effectivement
cancéreuses, non diagnostiquées comme telles et qui, repartant avec la
fausse réassurance d’une mammographie « normale », vont tarder à
reconsulter quand apparaîtront les signes cette fois cliniques de leur
maladie. De telle sorte que, paradoxalement, le dépistage systématique
aura, chez elles, contribué à retarder le diagnostic et le traitement,
ce qui est d’autant plus regrettable que les tumeurs les plus
explosives – celles qui ont le plus de chances d’emporter rapidement
une femme – sont précisément celles qui peuvent parfaitement apparaître
dans l’intervalle séparant deux mammographies [6].
• Plus grave encore, il va
y avoir des faux positifs, à savoir des femmes qui vont se retrouver
avec un diagnostic de cancer alors qu’elles n’en ont aucun. Dès lors,
elles vont se voir embarquées dans une médicalisation qui va pouvoir
aller, selon les cas, de la simple biopsie (avec toute l’angoisse
inhérente) à la chirurgie et au traitement – avec tous ses effets
iatrogènes. Les auteurs de la revue Cochrane susmentionnée estiment que
pour une femme dont l’espérance de vie va être prolongée (ils ne
disent pas de combien) par une mammographie, deux cents femmes seront
victimes d’une fausse alerte et devront passer par des examens
complémentaires (biopsie…) inutilement anxiogènes et coûteux, tandis
que dix n’auront même pas la chance de voir rectifiée cette erreur de
diagnostic et seront donc soumises – sans la moindre justification –
aux joies connues d’une chirurgie délabrante, de la radiothérapie et de
la chimiothérapie : il suffit de penser aux copines dans la situation
pour se représenter le tableau…
De plus et pour
indubitablement cancéreuses qu’elles puissent être, nombre de tumeurs
mammaires ont un développement extrêmement lent : tellement lent
qu’elles seraient restées muettes sur toute la durée de vie des femmes
concernées [6] ; certains auteurs n’hésitent pas à soutenir que
certaines tumeurs pourraient même spontanément régresser [7]. En
d’autres termes, des femmes vont subir le martyr d’une prise en charge
anticancéreuse pour des tumeurs dont elles n’auraient jamais entendu
parler toute leur vie durant.
D’autre part et quoique
je n’aie pas vu d’études consacrées à ce sujet, c’est une remarque que
m’ont parfois faite des chirurgiens consciencieux que certaines
tumeurs, a priori minuscules et à ce titre supposées ne pas poser de
problème thérapeutique, semble « flamber » une fois qu’elles ont été
opérées, comme si la chirurgie en avait exacerbé le potentiel
d’exacerbation et de diffusion : situation là encore regrettable si les
minuscules tumeurs en question étaient de celles qui seraient restées
latentes si on n’avait pas été les taquiner à coups de bistouri… Il
s’agit, répétons-le, de simples observations individuelles, mais qui
pourraient au moins justifier des études afin d’examiner ce risque
iatrogène potentiel de la chirurgie.
Enfin, il est utile de
rappeler que, outre ses inconvénients patents en termes de faux
positifs, la mammographie – comme toute procédure médicale – mériterait
de voir mieux évalués ses effets indésirables directs : outre
l’inconfort voire la douleur (rapportés par de nombreuses femmes), on
peut notamment s’interroger sur les effets cumulés d’irradiations
répétées.
Récapitulation
Sous l’influence
de ce qu’il faut bien appeler une promotion assez systématiquement
mensongère, les femmes – surtout celles que nous aimons… – ont été
conduites à penser que la détection par mammographie d’une tumeur
maligne allait « sauver leur vie ». C’est essentiellement faux.
• Chez une
personne donnée, même si le cancer est réel, le bénéfice d’une
détection mammographique est marginal (par rapport à ce qui se serait
passé si le cancer avait été détecté cliniquement), pour ne pas dire
infinitésimal : la plus complète des revues disponibles sur le sujet
(cf. PJ) estime que seule, une femme sur 2000 testées pendant dix ans
échappera à un décès par cancer relativement à celles qui auront été à
la pêche plutôt que chez le radiologue. Elle ne dit pas du tout que
l’heureuse élue vivra plus longtemps et précise même qu’aucune étude
sérieuse ne permet de retenir un bénéfice du dépistage en termes de
survie globale : en d’autres termes, l’heureuse élue mourra comme les
autres – peut-être même des complications de son traitement
anticancéreux [8], ou de la multiplication des mammographies déclenchée
par le diagnostic initial de cancer…
• Pour une
heureuse élue chez 2000 femmes suivies sur 10 ans, il y aura dix fois
plus de malheureuses qui seront repérées et traitées à tort comme
cancéreuses – et qui, le cas échéant, pourront mourir de leur prise en
charge anticancéreuse… Pour le dire autrement : parmi toutes les femmes
qui croient et clament que la mammographie « leur a sauvé la vie », la
grande majorité n’a aucun cancer mammaire et la mammographie leur a
bel et bien gâché la vie…
• Relativement à
tant de malheur, on considérera comme presque anecdotiques les 200
femmes qui seront juste terrorisées durant quelques semaines à quelques
mois ; en attendant qu’on leur confirme qu’elles n’ont rien au sein –
après biopsies plus ou moins traumatiques et autres examens
complémentaires délicieux (et que, le cas échéant, on multiplie ensuite
le rythme des mammographies « compte tenu de l’alerte »…).
A qui ça profite ?
• A l’évidence, ça profite déjà au
lobby des radiologues – dont on sait qu’il est assez puissant chez nous
pour faire de notre pays le champion tous azimuts des échographies
obstétricales – avec un bénéfice dont on attend encore la moindre
démonstration.
• Cela profite aussi au Narcisse contemporain [9], trop
heureux de conforter son incapacité de penser l’Etre et le tragique de
la vie dans l’illusion qu’on peut « sauver sa vie » sur simple
rendez-vous, moyennant une procédure technique remboursée par la
collectivité…
• Cela profite, faut-il y insister, aux fabricants d’anticancéreux – de façon directe et indirecte.
o Directement, comme on l’a vu, en multipliant indûment le nombre de
femmes exposées à des traitements longs, multiples et coûteux.
o Indirectement, en entretenant – là encore sur les fonds publics (via
des campagnes de dépistage excessivement médiatisées, renforcées par
des associations de malades manipulées) – un climat général de peur qui
érode l’exigence pourtant incontournable du consentement informé pour
transformer les citoyens en clients trop dociles d’anticancéreux
« innovants » dont la supériorité sur les produits anciens et moins
coûteux reste, elle aussi, à démontrer [10].
• Cela profite, enfin, aux « responsables » politiques (pardon pour l’oxymore…) et, là encore, de deux façons.
o En entretenant les citoyens, moyennant une propagande centrée sur des
pathologies affectivement très connotées (le sein, la prostate), dans
la douce illusion qu’on s’occupe de leur santé, quand – sans cesse
aggravée par l’irresponsabilité des Parlementaires et des
administrations sanitaires – la réglementation pharmaceutique accélère
la mise sur la marché de médicaments au mieux inutiles et le plus
souvent exagérément toxiques.
o En détournant l’attention, via l’exhortation à la responsabilité
individuelle, des vrais problèmes de santé publique qui, eux, relèvent
bien davantage d’une volonté politique que de l’initiative personnelle.
Pour ne s’en tenir qu’à cet exemple connexe : pourquoi l’incidence des
cancers mammaire n’a-t-elle cessé d’augmenter au cours des décennies ?
Qui a les moyens effectifs de gouverner l’exposition des citoyens aux
hormones exogènes, aux radiations, et aux innombrables polluants
chimiques dont il existe d’excellentes raisons pour penser qu’ils
pourraient jouer un rôle dans cette épidémie moderne ?
Conclusion
A ce stade de l’information, il n’est pas utile
d’entrer dans un détail plus fin des évaluations ou des controverses :
je n’ai jamais soutenu, par exemple, que les évaluations Cochrane
étaient irréfutables ou que tous les confrères qui pensent que la
mammographie peut être utile étaient nécessairement des brigands.
Mais de même
qu’avec les vaccins contre la grippe[11] (et plus encore eu égard aux
conséquences iatrogènes potentiellement terribles des campagnes de
mammographie), la justification du présent article repose sur un
constat clair, déjà fait par d’autres [12] et qu’il est difficile de
contester : il y a un contraste effarant entre les preuves d’un
bénéfice pour la santé publique – qui sont inexistantes – et la débauche
de moyens mis en œuvre par les autorités sanitaires, le personnel
médical ou certaines associations pour convaincre les citoyens du
contraire.