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23 décembre 2009

Annoncer une énormité dont le monde se récrie, la désavouer avec indignation...

feuilles_dautomne

Annoncer une énormité dont le monde se récrie, la désavouer avec indignation, jurer ses grands dieux, se déclarer honnête homme, puis, au moment où l'on se rassure et où l'on rit de l'énormité en question, l'exécuter. On est dans son cercle intime ; il laisse entrevoir un projet qui semble, non immoral, on n'y regarde pas de si près, mais insensé et dangereux, et dangereux pour lui-même ; on élève des objections ; il écoute, ne répond pas, cède quelquefois pour deux ou trois jours, puis reprend son dessein, et fait sa volonté. Il y a à sa table, dans son cabinet de l'Élysée, un tiroir souvent entr'ouvert. Il tire de là un papier, le lit à un ministre, c'est un décret. Le ministre adhère ou résiste. S'il résiste, il rejette le papier dans le tiroir où il y a beaucoup d'autres paperasses, rêves d'homme tout-puissant, ferme ce tiroir, en prend la clef et s'en va sans dire un mot. Le ministre salue et se retire charmé de la déférence.

Le lendemain matin, le décret est au Moniteur. Quelquefois avec la signature du ministre.

Grâce à cette façon de faire, il a toujours à son service l'inattendu, grande force ; et ne rencontrant en lui-même aucun obstacle intérieur dans ce que les autres appellent conscience, il pousse son dessein, n'importe à travers quoi, nous l'avons dit, n'importe sur quoi, et touche son but.

Dans ses entreprises il a besoin d'aides et de collaborateurs ; il lui faut ce qu'il appelle lui-même "des hommes". Diogène les cherchait tenant une lanterne, lui il les cherche un billet de banque à la main. Il les trouve. De certains côtés de la nature humaine produisent toute une espèce de personnages dont il est le seul centre naturel et qui se groupent nécessairement autour de lui selon cette mystérieuse loi de gravitation qui ne régit pas moins l'être moral que l'atome cosmique...

Ces hommes lui font cour et cortège ; ils mêlent leur rayonnement au sien. A certaines époques de l'histoire il y a de grands hommes ; à d'autres époques, il y a des pléiades de chenapans.

Il a réussi. Il a pour lui désormais l'argent, l'agio, la banque, le comptoir, la bourse, le coffre-fort et tous ces hommes qui passent si facilement d'un bord à l'autre quand il n'y a à enjamber que la honte...

Quand on mesure l'homme et qu'on le trouve si petit, et qu'ensuite on mesure le succès et qu'on le trouve si énorme, il est impossible que l'esprit n'éprouve pas quelque surprise. On se demande : comment a-t-il fait ? On décompose l'aventure et l'aventurier, et en laissant à part le parti qu'il tire de son nom et certains faits extérieurs dont il s'est aidé dans son escalade, on ne trouve au fond de l'homme et de son procédé que deux choses : la ruse et l'argent.

Napoléon le petit ( Victor Hugo)

 

Que peut-il ? Tout. Qu'a-t-il fait ? Rien.
Avec cette pleine puissance,
en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France,
de l'Europe peut-être. 
Seulement voilà, il a pris la France et n'en sait rien faire.

Dieu sait pourtant que le Président se démène :
il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ;

ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ;
c'est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! cette roue tourne à vide.
 
L'homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère,
est un carriériste avantageux.
Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui
brille, toutes les verroteries du pouvoir. Il a pour lui l'argent,
l'agio, la banque, la Bourse, le coffre-fort.

Il a des caprices, il faut qu'il les satisfasse.
Quand on mesure l'homme et qu'on le trouve si petit
et qu'ensuite on mesure le succès et qu'on le trouve énorme,

il est impossible que l'esprit n'éprouve pas quelque surprise.

On y ajoutera le cynisme car, la France, il la foule aux pieds,

lui rit au nez, la brave, la nie, l'insulte et la bafoue !
Triste spectacle que celui du galop, à travers l'absurde,
d'un homme médiocre échappé ".

Non, cet homme ne raisonne pas; il a des besoins, il a des caprices, il faut qu'il les satisfasse. Ce sont des envies de dictateur. La toute puissance serait fade si on ne l'assaisonnait de cette façon...

(Victor Hugo, dans "Napoléon le petit")

VictorHugo

 

napoleon_le_petit

Et, au sujet de Napoléon I :

Le 5 décembre 1847, Victor Hugo écrit dans ses carnets (« Choses vues. 1847-1848 », Folio. p. 188) : « Les journaux anglais racontent qu’il est arrivé du continent à Hull plusieurs millions de boisseaux d’ossements humains. Ces ossements, mêlés d’ossements de chevaux, ont été ramassés sur les champs de bataille d’Austerlitz, de Leipzig, d’Iéna, de Friedland, d’Eylau, de Waterloo. On les a transportés dans le Yorkshire, où on les a broyés et mis en poudre et de là envoyés à Doncaster, où on les emploie comme engrais. Ainsi, dernier résidu des victoires de l’Empereur : engraisser les vaches anglaises. ».

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