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13 décembre 2009

"La connaissance de la faute est le commencement du salut."

039_07

Tu crois qu'il n'est arrivé qu'à toi, et tu t'étonnes comme d'une chose étrange, d'avoir fait un si long voyage et tant varié les itinéraires sans dissiper la lourde tristesse de ton cœur ? C'est d'âme qu'il te faut changer, non de climat. Tu as beau franchir la vaste mer; "rivages et cités ont beau reculer sous ton regard", tu seras, où que tu abordes, suivi par tes vices. A quelqu'un qui formulait la même plainte Socrate répliqua :"Pourquoi es-tu surpris de ne profiter en rien de tes longues courses ? C'est toi que tu emportes partout. Elle pèse sur toi, cette même cause qui t'a chassé au loin".

Quel réconfort attendre de la nouveauté des sites, de la connaissance des villes ou des endroits ? Cela ne mène à rien de balloter ainsi. Tu demandes pourquoi tu ne sens pas dans ta fuite un soulagement ? Tu fuis avec toi. Il te faut déposer ce qui fait poids sur ton âme : aucun lieu jusque-là ne te donnera du plaisir.
Tu cours ça et là pour rejeter le poids posé sur toi et rendu, par le ballotement même, plus incommode : pareillement, sur le navire, la cargaison, en équilibre stable, exerce une moindre pression; roulant pèle-mêle dans la cale, elle noie plus vite le flanc où elle porte. Tout ce que tu fais, c'est contre toi que tu le fais; et le mouvement même t'est contraire : tu remues un malade.

Mais aussi, quand tu te seras délivré du mal, tout déplacement ne te sera plus qu'agréable. On aura beau te reléguer aux extrémités de la terre : quel que soit le recoin du monde barbare où l'on t'aura logé, tu trouveras à ta résidence, dans tous les cas, un air hospitalier. L'important n'est pas de savoir où, mais dans quel esprit tu arrives; et voilà pourquoi nous ne devons à aucun lieu assujettir notre âme. Dirigeons notre vie suivant cette conviction : "Ma naissance ne m'attache pas à un unique recoin, l'univers est ma patrie." Si c'était là pour toi une vérité manifeste, tu ne t'étonnerais pas de ne rien trouver qui te soulage dans tes déplacements variés, dans ces transmigrations où l'ennui des contrées précédemment vues t'entraîne coup sur coup. Tous les pays successivement auraient eu pour toi du charme, si tu regardais chacun d'eux comme ton pays.

En fait, tu ne voyages pas, tu vagabondes, au gré du caprice qui te pousse et tu changes de lieu pour quelque autre lieu, alors que l'objet dont tu es en quête, l'art de bien vivre, a son lieu partout...
Il est temps de finir, non sans que j'aie préalablement acquitté mes droits de sortie.

"La connaissance de la faute est le commencement du salut."
Ceci qui est d'Épicure, me paraît excellemment dit. Quiconque ignore qu'il fait mal n'a pas la volonté de se corriger. Il faut se surprendre en faute pour commencer à s'amender. Certains tirent gloire de leurs vices : crois-tu, toi, qu'on a le moindre souci de remède, quand on compte ses tares pour des vertus ?

Prends-toi donc sur le fait, autant que tu le pourras; informe contre toi-même. Sois d'abord ton accusateur, puis ton juge; ne te fais ton avocat qu'en dernier lieu. A l'occasion sache te désobliger.

Sénèque (lettres à Lucilius)

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